Cher lecteur, chère lectrice,
J’aimais bien l’idée de vous envoyer cette infolettre le mardi matin, douvanjou, très tôt (trop tôt même parfois), comme un petit café ou un petit thé pour démarrer la journée. Mais aujourd’hui, ça commence un peu plus tard et on va faire avec.
Alors, bienvenue à notre premier numéro de Haïti Recherche, le lancement d'une série de bulletins qui, je l'espère, sera longue et enrichissante. C’est surtout un bulletin-pilote et le format pourrait évoluer légèrement d’ici le mois prochain. Pour l’instant, il y a moins de 10 publications qui sont présentées, mais c’est déjà assez copieux. Progressivement, on va s’en aller vers un format avec au moins 10 publications par bulletin. Les publications présentées dans ce bulletin feront l’objet au fil des prochaines semaines de commentaires personnels et d’analyses plus détaillées (qui seront probablement réservés à ceux et celles qui ont un abonnement payant). Quant à ce bulletin lui-même, il est et restera toujours gratuit.
Pendant la préparation du bulletin, j'ai dû prendre des décisions difficiles pour n'inclure que le meilleur, afin de tenir la promesse de qualité que j’avais faite. Si vous appréciez ce contenu, n'hésitez pas à le partager dans votre réseau, à l'exploiter pour vos interventions sur le terrain ou vos recherches, ou, si ce n’est déjà fait, à opter pour un abonnement payant pour soutenir la pérennité et l'évolution de ce projet.
J’ai décidé d’adopter le thème Cris d’espoir pour ce premier bulletin, car l’espoir semble être le fil d’Ariane qui relie les divers contenus, même les plus durs. Car l’espoir dont je parle, ce n’est pas cet espoir calme, plat, nonchalant dont nous avons l’habitude. Mais un espoir qui nait dans la souffrance et les cris, le genre d’espoir qui accueille l’arrivée difficile d’un nouveau-né à l’embouchure de la vie. Oui, des cris d’espoir.
Voici donc un petit aperçu de ce que vous découvrirez dans ce bulletin. Dans la section "Publications Scientifiques", vous apprendrez par exemple qu’en matière d’aide humanitaire et de consolidation de la paix, les Haitiens, contrairement à ce qu’on pourrait penser étant donné les critiques et les scandales qui entourent habituellement les organisations et ONG internationales, ne font pas nécessairement plus confiance aux organisations locales et communautaires. Dans certains cas, c’est même l’inverse. Vous plongerez aussi dans quelques chiffres sur les demandeurs d’asiles haitiens et une réflexion sur un concept de “frontière raciale”, au-delà de la frontière physique qui délimite les États. Vous verrez également ce qu’une étude a découvert sur les idéations suicidaires en Haiti.
Le tout sera complété par une section bonus qui reprend d’anciennes fiches qui aident à mieux comprendre la problématique des gangs en Haiti et les solutions qui existent pour ce fléau (spoiler: une intervention armée ne suffira pas!). Ces fiches permettront d’éclairer la récente résolution du Conseil de Sécurité de l’ONU pour la mobilisation d’une force multinationale (urgente, selon moi) dirigée par le Kenya en soutien à la police haitienne pour lutter contre les gangs et sécuriser le pays
Côté rapports et travaux académiques ou institutionnels, on parlera d’une thèse de doctorat fraichement complétée sur la maternité adolescente en Haiti, d’un nouveau rapport de la Banque Mondiale sur Haiti, d’un rapport de l’ONU sur la situation à la frontière avec la République dominicaine (et voici pourquoi ça devrait intéresser particulièrement nos lecteurs canadiens), et d’autres rapports pertinents.
Côté travaux de journalistes, reportages et interventions dans les médias, je pointerai plusieurs textes qui aident à comprendre ce qui se passe entre Haiti et la République dominicaine, les meilleurs comptes-rendus et revues de presse sur l’actualité en Haiti pendant les dernières semaines. Et, pourquoi pas, bien plus encore, dans la zone “fourre-tout” qui s’appelle “Autres publications”.
Alors, je vous dis bonne lecture et à bientôt. Et je vous rassure tout de suite, mes introductions futures ne seront pas toujours aussi longues.
Stevens
PS: Je suis ravi de reprendre goût à l'écriture grâce à vous et j'espère que vous partagerez mon enthousiasme.
Publications Scientifiques
Vue d'ensemble : Trois nouveaux articles scientifiques ont particulièrement retenu mon attention. Je reprends également des extraits de mes anciens bulletins qui avaient abordé la question de la sécurité, de la violence armée et des interventions militaires de l’ONU en Haiti, afin de fournir un peu de perspective sur la nouvelle résolution du Conseil de Sécurité de l’ONU et des promesses de la force multinationale qui sera dirigée par le Kenya.
Sur plusieurs aspects en matière de consolidation de la paix et d’aide humanitaire, et contrairement aux suppositions courantes, la population haïtienne accorde plus de confiance aux organisations internationales comme l’ONU et aux ONG internationales qu'aux organisations locales et communautaires. Non, ce n’est pas une erreur, vous avez bien lu. C'est en effet ce que révèle une étude récente parue dans la revue World Development, conduite par deux chercheurs de la prestigieuse Université de l’Essex en Grande-Bretagne, aidés d’une équipe de travailleurs sociaux et d’étudiants gradués. Cette équipe a conduit des enquêtes en face à face auprès de 2335 participants en Haïti, à l’automne 2019. L'approche expérimentale employée a réparti au hasard les participants en trois groupes, chacun répondant à des questions attribuées aléatoirement concernant soit les organisations internationales comme l'ONU, soit les ONG internationales comme Save the Children, Caritas, Action Aid ou Compassion International, soit des organisations locales ou communautaires comme Fonkoze, Fokal, Zanmi Lasante ou des églises locales.
À la surprise des chercheurs, les Organisations Internationales sont perçues comme légèrement moins exposées à la corruption que leurs homologues locales ou communautaires. Le risque de corruption est aussi perçu comme nettement moindre pour les ONG internationales. Ces ONG sont même perçues comme plus inclusives, plus proches des préoccupations et des intérêts de la population locale que les organisations locales. Toutefois, ces dernières ont une meilleure côte de confiance en matière d’inclusion que les organisations de type ONU, qui apparaissent comme plus déconnectées des besoins réels de la population, un résultat anticipé par les auteurs. De plus, en matière de capacité à terminer un projet à temps, dans les délais promis, les participants semblent faire plus confiance aux organisations locales ou communautaires qu'aux organisations ou ONG internationales. C’est surprenant, car ces organisations étrangères disposent généralement de plus de ressources financières pour mener à bien leurs projets. Ce résultat pourrait refléter la désillusion de la population devant certaines fausses promesses faites par ces organisations par le passé, ou encore la possibilité que les organisations locales ou communautaires, ayant accès à d'autres ressources comme un bon réseau de contacts et une plus grande proximité avec la population, aient plus de chances de mener leur projet à bout.
Cette étude se présente dans un contexte où le conseil de sécurité de l’ONU vient, le lundi 2 octobre 2023, d'approuver une résolution autorisant le déploiement d'une force multinationale dirigée par le Kenya pour aider à combattre les gangs en Haïti. En l’absence d’études, on ignore encore si la population fait confiance à cette mission, qui devrait durer un an (mais on nous l’a déjà fait, ce coup-là, ça risque de durer plus longtemps). Cet article nous rappelle toutefois l'importance de sonder les opinions des personnes concernées plutôt que de supposer leurs préférences.
Une nouvelle publication de plusieurs chercheurs de l’Université de Toronto développe une réflexion intéressante sur la notion de “frontière”. Ces chercheurs avancent que les Haitiens se retrouvent coincés non pas seulement dans les limites d’une frontière physique avec d’autres pays, mais aussi dans un “régime frontalier hémisphérique” qui englobe l’ensemble du continent américain. Ce régime frontalier, non visible mais bien réel, confine les Haitiens et les repousse, obligeant les demandeurs d’asile à emprunter des chemins tortueux et dangereux pour fuir la violence. S’il est vrai que le droit international en matière d’asile condamne toute exclusion basée sur la race, la religion, la nationalité, l’appartenance à un groupe particulier et l’opinion politique, malheureusement, ce n’est pas ce qu’on voit dans le cas des haitiens. On voit plutôt, que ce soit au Brésil, en Colombie, au Mexique ou en Amérique du Nord un véritable régime frontalier se mettre en place, profondément influencé par les préjugés raciaux et néocoloniaux envers les haitiens. En plus des statistiques présentées dans le tableau ci-dessous sur la répartition de la diaspora, l’article met en lumière combien l’accès au statut de réfugié est difficile pour les haitiens. Entre 2009 et 2022, un grand nombre d'Haïtiens ont demandé l'asile en Amérique latine :
43 421 en Colombie,
7 972 au Chili,
169 052 au Brésil et,
35 227 au Mexique.
Mais seulement 5 Haïtiens ont obtenu l'asile au Brésil et 2 575 au Mexique, et aucun en Colombie ou au Chili, rapporte l’article. Ce qui prédominait, c’était surtout les statuts temporaires, les visas humanitaires et autres statuts d’immigration par définition fragiles et précaires. Par exemple, selon les auteurs, bien que les Haïtiens aient massivement demandé l'asile au Brésil entre 2011 et 2015, ils ont été catégorisés comme "migrants humanitaires" plutôt que réfugiés, ce qui limitait leur accès à certaines protections (contre la déportation, par exemple). Cette distinction a mis les Haïtiens dans une situation précaire comparée à celle des ressortissants syriens, vénézuéliens et afghans, qui ont pu accéder plus aisément au statut de réfugié. Cet exemple met bien en évidence les obstacles discriminatoires auxquels les Haïtiens et certains Africains sub-sahariens sont confrontés dans leur quête d'asile, malgré des situations humanitaires comparables avec d’autres peuples. L’article offre des analyses tout aussi informées sur la situation difficile des migrants haitiens en Colombie et au Mexique. Sa plus grande originalité est ce concept de “régime frontalier hémisphérique” ou de “frontière raciale” qui capture bien le caractère étendu et immatériel (en tout cas, pas comme ce mur littéral que la République dominicaine est en train de constuire sur la frontière haitiano-dominicaine) du refoulement géographique des Haitiens et des Haitiennes dans l’hémisphère.
Les Haitiens, un peuple joyeux? résilient? souriant malgré toutes les raisons de pleurer? C’est peut-être vrai, mais nous ne vivons pas dans un monde de tiers exclus. Parfois une chose est vraie, et son contraire aussi. Une étude vient d’asséner un coup de grâce (bon, j’exagère un peu) à un mythe qui a la vie dure, celui de l’haitien qui n’est jamais dépressif ou encore de l’haitien qui n’a pas le temps de penser au suicide. A partir d’une enquête menée auprès de 673 résidents de Cité-Soleil dans la première moitié de l’année 2021, les auteurs de cette recherche ont découvert que 65.3% des participants avaient des idées suicidaires. Cela ne veut pas dire qu’ils passeront à l’acte, bien entendu. Mais c’est tout de même inquiétant. Et l’haitien avec des idéations suicidaires est plus souvent, en fait, une haitienne parait-il, l’étude ayant trouvé que les femmes étaient deux fois plus susceptibles de rapporter des idéations suicidiares. La recherche note également que la prévalence des idéations suicidaires était plus élevée chez les participants qui avaient vécu des traumatismes d’enfance. L’étude présente toutefois des limites importantes à considérer, notamment la possibilité d’un biais de sélection n’est pas écartée vu la méthode d’échantillonnage non aléatoire. Il faut noter aussi que ce concept d’idéation suicidaire n’est pas facile à définir. Sa définition et son opérationnalisation ne font pas toujours l’objet de consensus.
Dans cette section, je revisite rapidement des fiches précédemment publiées dans un autre bulletin, offrant des analyses perspicaces sur la dynamique des gangs en Haïti, ainsi que sur les efforts nationaux et internationaux pour y remédier. L’ensemble de mes anciens bulletins (qui totalisent 136 pages) est accessible aux abonnés payants (cliquer ici), mais je vous propose à tout le monde, tout de suite, un billet détaillé qui reprend et adapte un bulletin spécial que j’avais préparé en avril 2022 sur la violence armée en Haiti. Les fiches couvertes offrent un éclairage opportun alors qu'une force multinationale dirigée par le Kenya (là même où le Canada a démontré son manque de leadership et de sensibilité face à la crise haitienne) se prépare à intervenir en Haïti. Cette intervention rappelle en effet certains aspects de la mission MINUSTAH de l'ONU, bien que l’intervention ne soit pas officiellement reconnue comme une mission onusienne. Les travaux présentés dans le billet apportent des clés de lecture essentielles pour comprendre et anticiper les défis à venir, en évitant les erreurs du passé. Ils explorent l'histoire des gangs en Haïti, la transition perçue de la violence politique à la violence criminelle, les interactions entre les gangs et les acteurs humanitaires, ainsi que les leçons tirées des efforts de la MINUSTAH pour combattre les gangs entre 2004 et 2007. Et en biais, j’évoque aussi le problème de l’origine des munitions et des armes que détiennent les gangs. Les recherches couvertes dans ce billet examinent les stratégies adoptées pour lutter contre les gangs, mettant en avant la nécessité d'une approche intégrée qui va au-delà des méthodes traditionnelles et qui implique une gouvernance sécuritaire substitutive. Ces analyses mettent en lumière l'importance d'aborder la question des gangs en Haïti d'une manière holistique, en tenant compte des acteurs politiques et économiques, des interventions internationales, ainsi que de l'impact des catastrophes naturelles, comme le tremblement de terre de 2010, sur la dynamique de la violence des gangs en Haiti (par exemple, la libération de 700 membres de gangs à la suite de l'effondrement des prisons lors du séisme a contribué à la résurgence des gangs en Haiti). Je vous invite à cliquer sur ce lien pour accéder au billet.
Travaux Académiques et Institutionnels
Vue d'ensemble : Une thèse de doctorat sur la maternité adolescente et plusieurs rapports d’organismes de référence ont été publiés.
J’ai grandi dans un milieu en Haiti où j’ai vu beaucoup d’adolescentes tomber enceinte. A une époque pas si lointaine, cela impliquait automatiquement pour ces filles qu’il allait falloir se marier. Combien de vies ont été ainsi gâchées? La maternité adolescente reste un phénomène préoccupant en Haiti. Une thèse de doctorat de 337 pages due à David Jean Simon de l’Université Panthéon-Sorbonne et publiée au début de l’année a été consacrée entièrement à cette question. Je me suis “tapé” les 337 pages et ce qu’on y apprend donne de l’espoir tout en restant alertant. C’est une thèse en sociologie plutôt solide, elle combine à la fois des approches quantitatives et qualitatives. Elle utilise des données de cinq enquêtes démographiques et de santé menées entre 1994 et 2017, ainsi qu'une enquête qualitative menée en 2020. L’auteur commence par souligner qu’avant les années 1960, dans presque tous les pays du monde, donner naissance pendant l’adolescence était perçu comme normal. Il faut dire que l’espérance de vie était faible aussi à l’époque. Puis un changement de perception a commencé à s’opérer dans les pays développés puis s’est étendu aux autres pays. La Conférence Internationale sur la Population et le Développement (CIPD) de 1994 a été un grand moment: 179 pays ont reconnu que les adolescentes étaient un groupe à risque en raison de leur précarité socio-économique, de leur vulnérabilité physiologique et de leur faible accès au planning familial. Ces pays se sont engagés à mettre en œuvre des programmes visant à limiter la fécondité des adolescentes et à répondre à leurs besoins en santé sexuelle et reproductive. En Haiti, récemment, au vu des progrès insuffisants - malgré de nombreux efforts et plusieurs campagnes, il a été recommandé au gouvernement haïtien de renforcer ses stratégies et programmes de santé reproductive. Et c’est là que cette thèse est importante, car elle permet de ne pas foncer tête baissée sur le phénomène sans même bien le comprendre. C’est aussi une lecture très éclectique. On découvre par exemple des perspectives très différentes sur ce qu’est un adolescent (ainsi chez certains peuples en Afrique de l’Ouest, écrit Simon, “tant que les aînés ne reconnaissent pas un cadet comme adulte, quel que soit son âge, il est socialement et culturellement un « enfant » ou « adolescent »”, ce qui peut générer pas mal de frustrations). Concernant Haiti, la publication rapporte quelques transformations intéressantes, notamment le recul du mariage, la montée du célibat et le fait que plus d’adolescentes ont accès à l’éducation. Toutefois, les progrès sont lents sur d’autres aspects, et il y a même eu un recul sur certains points, comme dans l’accès à l’électricité. Par ailleurs, le cycle ovulatoire reste très peu maîtrisé par les filles et les femmes haïtiennes. Dans l’ensemble, sans prétendre résumer, c’est la thèse à lire si on est intéressé à avoir un bon portrait de l’évolution du phénomène en Haiti.
La plus récente évaluation de genre de la Banque Mondiale pour Haiti montre que les inégalités se sont accentuées notamment dans 4 domaines:
Inégalités dans le marché du travail, avec des obstacles et opportunités inégales pour les femmes
Écart de genre dans l'environnement juridique et réglementaire
Comportements risqués et leurs conséquences disproportionnées en fonction du sexe.
Vulnérabilités liées au genre suite aux désastres naturels.
Tout n’est pas rose non plus du côté des hommes. On note par exemple que les hommes haitiens (62 contre 66 ans) ont une durée de vie plus courte, sont plus susceptibles de comportements à risques comme l'alcool et le tabac, et sont plus enclins à la violence et au suicide. De plus, “24 pour cent de garçons avaient un retard de croissance, comparé à 20 pour cent de filles en Haïti”.
Il y aussi quelques semi-bonnes nouvelles, particulièrement en éducation. Ainsi, on apprend que:
Notamment, les écarts de genre dans les inscriptions se sont réduits ou se sont inversés au niveau secondaire et de l’enseignement supérieur, mais pas au niveau de l’école primaire. Parmi la proportion réduite d’Haïtiens âgés de 15-24 qui poursuivent des études supérieures, il y a plus de filles que de garçons dans les zones rurales. Les garçons ont cependant un taux net de fréquentation scolaire plus élevé que les filles à l’école primaire dans les zones rurales et les garçons en zone urbaine ont un taux d’achèvement plus élevé pour les études supérieures. Les hommes adultes sont plus susceptibles d’avoir suivi les cours ou avoir terminé l’école secondaire ainsi que les études supérieures. (Banque Mondiale, 2023)
On peut consulter la synthèse du rapport ici (39 pages).
Depuis mi-septembre, la frontière haitiano-dominicaine est fermée sur fond de tensions entre les deux pays autour de l’exploitation de la Rivière Massacre. Le Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations Unies a publié une note fin septembre sur les impacts négatifs potentiels de cette décision du président dominicain dans les domaines suivants: détérioration de la disponibilité des médicaments, la sécurité des migrants, la protection des enfants, et les répercussions économiques.
Humans Righs Watch (HRW) a publié un rapport très détaillé de 118 pages au mois d’aout 2023 sur l’évolution de l’insécurité et des gangs en Haiti (âmes sensibles s’abstenir, les récits sont durs). Dans le rapport, on fait référence aussi à un autre rapport publié plus tôt par l’ONUDC qui fournit des informations intéressantes sur les armes illégales en Hait. Voici un extrait du rapport HRW qui en parle:
Haïti ne fabrique pas officiellement d’armes à feu ou de munitions et toutes les armes présentes dans le pays sont importées depuis des pays tiers, légalement ou illégalement. En 1994, les États-Unis ont imposé un embargo partiel sur les armes à Haïti, avec une exemption sur les envois d’armes et autres équipements de défense à la Police nationale haïtienne et aux Nations Unies, qui doivent être approuvés par le Département d’État américain.
Selon un rapport de l’ONUDC datant de 2023, il n’existe pas de statistiques officielles sur le nombre ou les types d’armes à feu en circulation en Haïti. Cependant, la grande majorité des armes en circulation seraient acquises illégalement auprès de revendeurs non agréés et ne seraient pas déclarées aux autorités douanières. Les armes proviendraient principalement des États-Unis, en particulier des ports du sud de la Floride, par l’intermédiaire de réseaux de la diaspora et de courtiers qui les introduisent clandestinement dans le pays par voie maritime, terrestre et aérienne, cachées dans des conteneurs de produits alimentaires frais et congelés, de matériel électronique, de vêtements, ou même dans la coque de cargos, en profitant de la porosité des frontières d’Haïti, en particulier avec la République dominicaine.
Selon l’ONUDC, les groupes criminels haïtiens recherchent des fusils d’assaut de type militaire. L’ONUDC a identifié des fusils de la série AR-15 (M-16, M-14, M-4), des fusils de type Kalachnikov (AK-47, Type-65, Galil), des mitrailleuses de type Negev, des revolvers 9 mm et des pistolets semi-automatiques utilisés lors des affrontements entre groupes criminels à Cité Soleil en 2022. Le Département américain de la Sécurité intérieure (Department of Homeland Security, DHS) a signalé que le trafic d’armes vers Haïti comprenait des armes de plus en plus lourdes et puissantes, telles que des fusils de sniper de calibre 50, des fusils de calibre 308 et des mitrailleuses alimentées par bande-chargeur.
Des représentants du gouvernement haïtien ont déclaré à Human Rights Watch que la plupart des saisies étaient constituées de fusils d’assaut, de pistolets et de munitions. Depuis 2021, les agents des douanes haïtiennes, la police haïtienne et d’autres agences ont saisi près de 800 armes à feu, principalement dans le département de l’Ouest, selon les chiffres de la police haïtienne. (HRW)
Travaux Journalistiques (Reportages)
Vue d'ensemble : Plusieurs journalistes et magazines à suivre, une enquête sur l’espionnage dominicain en Haiti.
J’ai déjà parlé de l’excellent travail que fait
dans pour nous tenir au courant de ce qui se passe, belles images à l’appui. Son équipe nous montre le côté sombre mais aussi ce qu’il reste encore de beau, de culturel et d’inspirant dans ce pays. Chaque semaine, ils publient une infolettre qui fait le tour des dernières actualités, comme la marche des femmes haitiennes le 28 septembre dernier pour demander la dépennalisation de l’avortement en Haiti (on y reviendra sans doute au cours des prochaines semaines), l’affaire du canal d’irrigation près de la frontière avec la République dominicaine, et bien plus encore. Il y a aussi qui publie d’excellents bulletins (en anglais) sur l’actualité. Ce sont mes deux sources sur Substack pour m’informer sur l’actualité en Haiti. Je les recommande donc vivement.Une enquête publiée par…Enquet’Action, un média haitien spécialisé dans les enquêtes d’investigation, vient tout juste (pendant que je finalise ce bulletin) de dévoiler que la République dominicaine semblait être au courant que le président Jovenel Moise allait être assassiné le 7 juillet 2021. Malheureusement, cette information repose sur une seule source, Frantz Thermilus, un inspecteur de la Police nationale d’Haïti. Celui-ci affirme que les Dominicains étaient au courant de l'assassinat imminent de Moïse, en se basant sur ses contacts en République Dominicaine.
« Oui, les Dominicains savaient que le président Jovenel Moïse allait être tué. Je n’ai pas besoin de fournir des détails, mais moi - ancien directeur de renseignement, je vous dis que les Dominicains savaient que le président allait être tué. Ok ! Un jour si on veut faire quelque chose de sérieux - je leur confierai tout cela ». Frantz Thermilus à Enquet’Action.
La République Dominicaine, à travers son Département National d’Investigation (DNI) et d'autres agences, mènerait des activités de renseignement en Haïti (ou espionnerait Haiti, pour le dire plus simplement), notamment en matière politique, économique, sécuritaire et agricole. Un incident mentionné dans l’article révèle la présence active d'agents du DNI en Haïti, soulignant l’intérêt continu de la République dominicaine pour les affaires haïtiennes. L’enquête souligne également une disparité technologique entre les deux nations en matière de renseignement, la République Dominicaine ayant un avantage significatif. Mais en attendant plus d’informations, tout cela reste à prendre avec prudence. Il faut surtout se garder de faire des conclusions hâtives. Les complots existent bien entendu, mais les démasquer prend du temps et de la rigueur.
Autres Publications dignes d’intérêt
Vue d'ensemble : Ces publications m’ont conquis, même si je n’ai pas pu les présenter.
Conclusion et Remerciements
Encore merci pour votre fidélité. N’hésitez pas à réagir et à partager autour de vous. Après cette première expérience, je vais essayer d’offrir des fiches courtes accompagnées de liens vers des articles plus longs et plus détaillés au lieu de chercher à tout mettre dans le bulletin. Comme le bulletin est accessible à tous et à toutes gratuitement, je voulais juste qu’il soit le plus complet possible, mais c’est mission impossible. Encore merci pour votre soutien, quel qu’il soit. Et à mardi prochain.
Merci beaucoup pour ces bons mots! Et courage dans cette nouvelle aventure Substack! On y. prend goût. ;)